Si vous souhaitez devenir bêta-lecteur, j’ai une bonne nouvelle pour vous : c’est un rêve très facile à réaliser. Les bêta-lecteurs font partie intégrante du processus d’écriture et ils sont très recherchés par les auteurs (notamment auto-édités) qui sont toujours en quête de retours sur leur roman.
Par conséquent, pour devenir bêta-lecteur, il vous suffit de vous rendre sur Twitter, Threads ou n’importe quel groupe Facebook dédié aux auteurs et de dire :
« Hey, j’ai du temps et je veux bien lire vos livres pour vous faire un retour gratuitement. »
Il est plus que probable pour que vous crouliez sous les propositions et votre PAL (Pile À Lire) dépassera la Tokyo Skytree avant la fin de la journée.
Voilà comment devenir bêta-lecteur. Facile, pas vrai ?
Maintenant voyons comment devenir un « bon » bêta-lecteur, car il ne suffit pas d’accepter de lire un roman et de se contenter d’un vague « J’ai aimé » ou « J’ai pas aimé » en guise de retour.
C’est un petit peu plus compliqué que cela.
Qu’est-ce qu’un auteur attend de ses bêta-lecteurs ?
Quelles sont les compétences nécessaires pour devenir un bêta-lecteur véritablement aidant ?
Comment faire un retour à un auteur sans le froisser ?
C’est ce que nous allons voir dans cet article.
Sommaire
Qu’est-ce qu’un bêta-lecteur ?
Un bêta-lecteur est une personne qui s’engage à lire un livre avant sa publication dans le but de fournir des retours constructifs à l’auteur.
Bien sûr, le mot-clé ici est « constructif », car les auteurs ne cherchent pas de bêta-lecteurs pour le plaisir de distribuer leur roman gratuitement avant sa publication ou pour s’entendre simplement dire « C’est vachement bien » (sinon, on se contenterait de demander à notre maman).
Le but ultime du bêta-lecteur (ou bêta-lectrice évidemment) est donc d’aider l’auteur à améliorer son roman en pointant du doigt tout ce qui fonctionne dans son récit, mais aussi (et surtout) tout ce qui ne fonctionne pas.
Il s’agit donc, en synthèse, de s’adresser à quelqu’un qui travaille depuis des mois sur un projet en lui disant : « Ce que tu as écrit, c’est vraiment super ! Mais d’un autre côté, je me demande si c’est si bon que ça… voir complètement mauvais. »
C’est un retour aussi difficile à donner qu’à recevoir, car l’auteur craint ces retours constructifs autant qu’il les espère.
Une bêta-lecture n’a donc rien à voir avec une lecture « loisir », mais plutôt un exercice difficile qui consiste à dire ses quatre vérités à un auteur tout en étant le plus diplomate possible.
Que doit corriger un bêta-lecteur ?
La liste des corrections va énormément varier selon s’il s’agit d’un bêta-lecteur amateur bénévole ou d’un professionnel/auteur.
Un bêta-lecteur professionnel ou auteur
Les professionnels sont généralement des auteurs ou des professionnels de l’édition qui réalisent des bêta-lectures contre rémunération pour arrondir leurs fins de mois.
Ils vont donc lire le roman avec un œil d’expert en écriture et feront un retour plus technique sur la structure du roman, son rythme, la fluidité de son style, etc.
C’est un peu comme de faire gouter un plat fait maison à un cuisinier professionnel. Il sera forcément plus pointu et plus précis dans son retour, mais il sera également fortement influencé par sa propre vision de l’écriture.
Il peut arriver, parfois, que les auteurs procèdent à un échange de services entre eux : « Je lis ton livre et tu lis le mien. »
Cette pratique est très intéressante pour tout le monde, car elle permet aux auteurs de bénéficier d’une bêta-lecture « pro » à moindre coût.
Un bêta-lecteur amateur
Mais l’appel à un pro n’est évidemment pas gratuit, et la plupart des auteurs auto-édités n’ont pas 500/600 euros à investir dans ce genre de retour (même s’ils sont très utiles).
C’est pourquoi les auteurs font généralement appel à des amateurs (au sens noble du terme) bénévoles.
Si vous êtes l’un de ces amateurs bénévoles, ne vous mettez pas trop la pression en essayant de faire aussi bien qu’un pro. Concentrez-vous sur les retours que vous êtes en capacité de faire en tant que lecteur lambda, c’est-à-dire :
- Les incohérences dans l’intrigue : « Mais il n’est pas mort dans le chapitre précédent lui ?! »
- Les passages obscurs ou incompréhensibles : « Qu’est-ce que l’auteur a voulu dire par là ? »
- Les incohérences psychologiques des personnages : « Je ne suis pas certain qu’un militant Greenpeace passerait ses week-ends à faire de la taxidermie pour se détendre. »
- Les émotions ressenties lors de certaines scènes : « J’ai bien rigolé en lisant la scène où la mère de l’héroïne meurt… »
La bêta-lecture d’un amateur est tout aussi précieuse que celle d’un professionnel, car cela constitue un test fictif pour l’auteur. Il saura, grâce à vous, comment les lecteurs lambda réagiront à son livre une fois qu’il sera publié.
Si vous trouvez les personnages attachants, dites-le à l’auteur. Si un personnage en particulier vous rend fou, l’auteur doit également le savoir.
N’oubliez pas que les bêta-lecteurs amateurs ne sont pas employés par l’auteur et qu’ils ne sont pas non plus des éditeurs. Un bêta-lecteur n’apporte pas de modifications à l’œuvre elle-même, mais recommande plutôt des changements.
C’est à l’auteur de décider s’il suit ou non ces recommandations.
Les compétences requises
Si tout le monde ou presque peut devenir bêta-lecteur, il faut des compétences particulières pour l’être efficacement.
#1 — Prenez conscience de la fragilité de la demande
De nombreux auteurs considèrent leurs livres comme leurs bébés, et c’est compréhensible.
Après tout, c’est leur idée, leur travail acharné et ils ont consacré un temps phénoménal à la création de ce manuscrit. Gardez cela à l’esprit lorsque vous commencez à lire.
Lorsque quelqu’un vous demande d’être un bêta-lecteur, cela signifie qu’il vous fait confiance. Il attendra votre retour autant qu’il le craindra.
S’il vous plaît, ne prenez pas cela à la légère.
#2 — Lisez avec deux casquettes
Lorsque vous lisez, il est essentiel d’adopter l’état d’esprit d’un lecteur ordinaire et celui d’un auteur (même si vous n’en êtes pas un).
Alors que l’auteur vous demandera probablement de noter quelques détails spécifiques lors de la lecture, essayez d’offrir encore plus que ce que l’on vous demande.
Par exemple, si vous avez des commentaires ou des idées sur l’intrigue, faites-lui part de vos suggestions :
« L’arrivée de la cavalerie pour sauver le héros est un peu téléphonée »
« Je pensais que ces deux personnages allaient tomber amoureux l’un de l’autre »
#3 — Prenez des notes en cours de bêta-lecture
Durant votre lecture, vous aurez sans doute remarqué certains points, des erreurs, des incohérences ou des maladresses.
Si vous attendez d’avoir terminé le roman dans son intégralité pour en faire un retour à l’auteur, vous en oublierez la moitié et des points importants pourraient ne pas être corrigés.
C’est pourquoi il est préférable de prendre des notes pendant la lecture, plutôt qu’après. Par ailleurs, cela vous fera gagner beaucoup de temps.
Notez chaque point dans la marge si vous disposez d’un exemplaire papier ou bien sur une feuille à part en notant le numéro du chapitre et de la scène s’il s’agit d’une version numérique.
N’hésitez pas à donner un avis sur chaque scène. Les auteurs ont parfois du mal à faire le tri dans leurs idées.
Si la scène vous a fait rire, vibrer ou pleurer, dites-le.
Si vous pensez qu’une scène ne sert à rien ou est ennuyeuse, dites-le également.
#4 — N’oubliez pas que l’écriture est subjective
Il se peut que vous ayez déjà pris conscience de ce point. Pourtant, un petit rappel est souvent nécessaire : La création littéraire est subjective.
Ce que certains écrivains aiment, d’autres peuvent le détester fortement. Si l’on vous demande de lire un genre particulier et que, à mi-parcours, vous découvrez que vous n’aimez vraiment pas ce que vous lisez, rappelez-vous que les écrivains (et les lecteurs) ont des goûts différents.
Il se peut que vous n’aimiez pas lire le genre pour lequel vous vous êtes engagé, mais vous pouvez tout de même garder un œil critique et faire des suggestions utiles.
Je le rappelle : l’auteur vous a fait confiance sur un projet qui lui tient énormément à cœur. Arrêter la lecture au milieu du livre et lui faire un retour du style « J’aime pas la science-fiction » serait ressentie comme une véritable trahison.
#5 — Lisez comme si vous étiez payé pour le faire
Même si vous êtes un bénévole, faites de votre mieux pour vous investir pleinement dans cette tâche.
Même si vous ne pouvez probablement pas consacrer des heures de vos journées à la lecture de l’œuvre d’un ami, faites de votre mieux avec le temps dont vous disposez.
Devenir bêta-lecteur, c’est accepter une responsabilité. Un auteur vous a fait confiance (je vous l’ai déjà dit ou pas ?) et il compte sur vous.
Vous devez prendre conscience de cet engagement et faire de votre mieux pour que le retour soit le plus rapide et de la meilleure qualité possible.
#6 — Acceptez le destin de vos retours
L’auteur a toujours le dernier mot.
Ce roman est le sien. Son nom figurera sur la couverture et il en assumera toute la responsabilité. Il est donc normal qu’il conserve la décision finale de suivre ou non vos recommandations.
Les auteurs n’ont pas besoin d’accepter tous les commentaires des lecteurs, et les bêta-lecteurs ne doivent pas se sentir mal si leurs commentaires sont pris en compte ou rejetés.
Comment faire un retour sans froisser l’auteur
La peur de vexer est sans doute le pire ennemi des bons bêta-lecteurs.
Si vous avez peur de blesser l’auteur en lui faisant votre retour, alors vous n’oserez pas lui dire ce que vous avez vraiment pensé de son livre et tout ce temps passé ne sera plus qu’un immense gâchis.
La méthode sandwich
Pour éviter de donner un avis trop fade ET de se fâcher à mort avec un auteur à qui vous rendez service, voici la structure à adopter pour rédiger votre retour : la méthode sandwich.
Le principe est simple : intercalez une tranche de négatif entre deux tranches de positif.
Cette structure est très efficace pour faire passer les pilules un peu difficiles à avaler. En plaçant des éléments positifs au début ET à la fin de votre retour, l’auteur aura le sentiment de recevoir un retour globalement positif tout en intégrant les éléments négatifs sur lesquels il pourra travailler.
Cette structure peut être utilisée à toutes les échelles du roman : scène, chapitre, partie et roman dans son ensemble.
Exemple :
« J’adore le concept de ton roman. Tu as su faire preuve d’une grande originalité dans l’idée de départ. Cela change de ce qu’on peut lire ailleurs.
Si je devais te conseiller de revoir quelque chose, ce serait sans doute au niveau des personnages. Je pense que tu devrais travailler leur voix pour que chacune d’elles soit véritablement unique.
Certaines scènes manquent également de rythme. La scène du climax, notamment, avec le combat final, devrait être plus haletante. Peut-être en raccourcissant tes phrases.
Enfin je voulais te féliciter pour ton travail de worldbuilding. Le degré de détail de ton monde imaginaire est vraiment impressionnant et tes descriptions sont très immersives.
On s’y croirait. »
Une seule contrainte pour que le retour sandwich soit pleinement efficace : tout doit être vrai.
Ne faites pas de louanges que vous ne pensez pas vraiment, cela serait contre-productif.
Et, oui, il existe toujours au moins deux points positifs à mettre en avant, même dans les pires romans jamais écris 😊
Comment devenir bêta-lecteur ?
Si vous souhaitez devenir bêta-lecteur, vous pouvez suivre quelques étapes simples. Tout d’abord, contactez vos amis écrivains et faites-leur savoir que vous avez du temps à consacrer à la lecture de leurs œuvres.
Deuxièmement, publiez un message dans les groupes d’écriture en ligne ou sur les réseaux sociaux et demandez si quelqu’un a besoin d’un bêta-lecteur.
Vous pouvez indiquer votre genre préféré et/ou le nombre de mots que vous acceptez.
Et si vous avez besoin d’un bêta-lecteur ?
Si vous avez écrit un livre et que vous décidez de passer à l’étape suivante et de le publier, vous pouvez chercher des lecteurs bêta pour votre projet.
Il vous suffit de faire une offre en ligne, de demander en personne à un collègue écrivain ou de contacter un ami.
Pour plus d’informations à ce sujet, vous pouvez lire l’article : « Comment trouver des bêta-lecteurs »
Mai si vous préférez passer par un bêta-lecteur professionnel, alors vous avez besoin d’apprendre à choisir le prestataire qui saura vous rendre la meilleure bêta-lecture au meilleur prix.
Pour cela aussi, il existe une solution : une formation compacte pour savoir comment choisir le meilleur prestataire.
La bêta-lecture est un processus amusant et peu stressant, qui peut être très bénéfique pour les deux parties du moment qu’il est fait avec un minimum d’application.
Faire appel à un bêta-lecteur représente, pour les auteurs, le meilleur moyen de déterminer s’ils ont atteint le but recherché avec l’écriture de leur roman, et une source précieuse de marge d’amélioration.
Quant aux lecteurs, devenir bêta-lecteur est une façon imparable d’aider un auteur dans le besoin et de participer au processus de création d’une œuvre littéraire.
Comme souvent, l’essentiel est que chacun y trouve son compte.
Si vous êtes un bêta-lecteur, j’espère que cet article vous aura aidé.
Si vous êtes un auteur, alors partagez cet article avec vos bêta-lecteurs pour vous garantir le meilleur retour possible sur vos romans.
Une réponse
Article pratique et méthodique, qui ne se limite pas qu’au concept.
Les exemples sont éclairants, les conseils judicieux.
Merci beaucoup.