En France, on estime qu’une personne sur quatre rêve d’écrire un livre. Cela représente environ 12 millions de personnes. Pourtant, seulement 600 000 d’entre elles se lanceront vraiment pour réaliser leur rêve. À peine 5 %. (Source : sondage Le Figaro Littéraire/Odoxa)
Ces chiffres me désespèrent.
Moi aussi, j’ai failli passer à côté de ce rêve d’écrire et de publier des livres. D’abord pour faire plaisir à Papa et Maman, et ensuite parce que je me disais que je ne saurais pas faire, que je ne savais pas par où commencer, que j’étais trop jeune, trop vieux, pas assez intelligent, que je n’avais pas le temps, que c’était trop tard… Blablablablabla.
Bref, toutes les excuses bidons qu’on se trouve à soi-même pour ne pas se lancer.
En 2018, j’ai franchi le pas et j’ai créé ce blog pour m’y aider, parce qu’enseigner est un excellent moyen d’apprendre. Avec le temps, je me suis rendu compte que mon blog n’aidait pas que moi, mais aussi d’autres personnes comme moi ; et j’ai commencé à l’utiliser pour aider les autres.
Aujourd’hui, je veux aider les 95 % de ceux qui rêvent d’écrire un livre à aller au bout de leur rêve. Je veux qu’ils écrivent le livre qu’ils ont dans la tête et je veux que leur livre soit lu. Parce que le rêve d’écrire ne vaut que s’il est partagé.
Chaque livre m’a permis d’améliorer la qualité de mon écriture, la construction de mes histoires et l’efficacité de mon processus d’écriture et d’édition.
Je suis loin d’être arrivé au bout de tout ce qu’il y a à savoir… en fait, ce n’est jamais terminé. Quels que soient notre niveau et notre expérience, il nous reste toujours quelque chose à améliorer. Mais voici ce que j’ai appris en plusieurs années de travail sur l’écriture d’un bon roman.
J’espère qu’ils vous épargneront les années de tentatives infructueuses que j’ai dû subir.
De nombreux blogs consacrés à l’écriture vous parleront d’intrigues, voire même de structures d’intrigue : la pyramide de Freytag, la structure en 3 actes, le voyage du héros, etc.
Beaucoup d’auteurs, dont moi à mes débuts, pensent que ces structures sont une espèce de recette qu’il suffit d’appliquer pour obtenir une bonne histoire, mais ce n’est pas le cas. Une bonne histoire part toujours des personnages.
Ce sont les personnages, et en particulier le protagoniste principal, qui vont faire avancer le récit de votre livre. Et si le lecteur est pris dans la lecture de votre roman, ce sera grâce à ses personnages, à leurs conflits intérieurs et à leur évolution constante entre le début et la fin de votre livre. Ce sont eux et non les scènes d’actions ou les rebondissements à répétition qui prendront vos lecteurs aux tripes. Écrire un roman en partant de l’intrigue (ou de la structure) vous mènera à une succession d’événements sans lien entre eux. Cela revient à vouloir monter une mayonnaise sans huile… ça ne prend pas. Votre huile, c’est votre personnage et ses conflits internes.
Lisez l’article « Construire un arc de personnage »
Je ne dis pas que l’intrigue ou la structure n’ont pas un rôle à jouer dans la construction de votre récit. Intrigue ET structure ont leur utilité sans le moindre doute… mais après la construction et l’évolution du personnage.
Concevez la construction de votre roman comme celle d’un gâteau à couches : une couche de biscuit, puis une couche de crème, puis une 2e couche de biscuit et enfin le glaçage pour rendre le tout présentable et appétissant.
Si vous commencez avec la crème, elle va s’étaler n’importe comment au fond de votre plat et votre recette sera ratée. Vous avez besoin de votre 1re couche de biscuit pour tenir le tout : c’est votre personnage et ses conflits internes.
La couche de crème, c’est votre intrigue qui se superpose à votre personnage avec ses actions et rebondissements.
La 2e couche de biscuit, c’est votre structure. Oui, elle vient presque à la fin ! Je sais, ça surprend, mais ce sont les effets des structures que vous devez appliquer à vos personnages, et non l’inverse.
Enfin, le glaçage pour rendre appétissant, c’est votre style, votre ton, la couleur de votre écriture. Description lyrique ou dialogue sarcastique, c’est à vous de voir quel filtre vous voulez placer sur votre récit, mais c’est définitivement ce qui vient en dernier.
Trop d’auteurs commencent par la fin en se concentrant presque exclusivement sur le style. Avez-vous déjà essayé de manger un bol de glaçage à la cuillère ? Beurk !
Il n’existe pas UNE bonne façon d’écrire un roman, mais quasiment une par auteur. Ce que je vous livre dans ces lignes est MON avis basé sur MON expérience. Libre à vous d’en tenir compte ou non.
Il existe un éternel débat entre auteurs, celui qui différencie les architectes et les jardiniers. En grossissant le trait, voici la différence entre les deux :
Les architectes préparent leur livre en amont, font des fiches, construisent le plan de leur intrigue, écrivent la biographie de leurs personnages. Avant même que les architectes commencent à écrire leur roman, ils savent exactement ce qui va se passer et comment leur histoire va se terminer.
Les jardiniers ne préparent rien. Ils partent d’une situation, d’un personnage ou d’un concept. Plante ce point de départ dans la terre comme une graine et la regarde pousser à mesure qu’ils l’écrivent. Ils n’ont aucune idée de ce qui va suivre et, d’une certaine manière, sont leur premier lecteur.
En réalité, personne n’est 100 % architecte ou jardinier. Nous sommes tous quelque part entre ces deux extrémités très caricaturales. Mais voilà mon avis sur la question : il est incroyablement difficile d’écrire une bonne histoire sans préparation.
Écrire sans préparation revient à laisser les rênes de son roman à vos personnages, or vos personnages ne doivent pas avoir le contrôle. Ils doivent subir les événements. C’est en subissant des contraintes fortes et douloureuses qu’ils seront confrontés à leurs conflits intérieurs et qu’ils seront forcés à évoluer (cf. Conseil n° 1).
La préparation représente donc le meilleur rempart pour éviter de se perdre dans une succession d’événements sans intérêt et d’écrire 327 pages qui ne débouchent nulle part (et c’est quelqu’un qui a plus de 2000 pages inutiles dans un tiroir qui vous le dit 😉).
Lisez l’article « Comment préparer son premier jet »
Pour clôturer ce conseil, je réponds directement à l’objection la plus fréquente des auteurs jardiniers sur ce sujet : préparer son roman avant l’écriture NE tue PAS la créativité. C’est même complètement l’inverse.
Tout d’abord parce que la créativité s’exprime pleinement pendant la phase de préparation. C’est à ce moment précis que les idées d’événements et de rebondissements viennent. Cette phase créative n’est donc pas supprimée, mais seulement décalée en amont.
Ensuite, car plus la phase de préparation est complète, plus ces idées évoluent, changent, gagnent en complexité et en originalité. Une idée jetée directement sur le papier devient « officielle » et ne peut être changée qu’au prix d’un gros travail de réécriture. En revenant à plusieurs reprises sur votre préparation, vous allez donc stimuler votre créativité en la forçant à creuser plus profondément.
Enfin parce que la préparation de la trame narrative avant l’écriture permet d’en être libéré pendant l’écriture. Vous pouvez alors vous concentrer pleinement sur le style, le ton et le rythme de votre récit. C’est beaucoup plus facile quand on n’a pas 50 choses à gérer en même temps.
« Quelle longueur doit faire mon roman ? Un chapitre ? Une description ? Une scène ? »
Ce sont des questions qui reviennent souvent sur les réseaux sociaux. Elle est compréhensible. Beaucoup d’auteurs veulent publier un pavé de 600 pages et ressentir la fierté d’un énorme travail accompli, mais ont peur d’ennuyer le lecteur si ça traine trop en longueur.
J’ignore si ma réponse va les rassurer ou les paniquer, mais la voilà : on s’en fout.
On se fout de savoir si votre livre fait 100, 300 ou 1000 pages. On veut juste lire une bonne histoire qui nous fait voyager, vibrer, rire, peur ou pleurer. Le reste n’a aucune espèce d’importance.
Lisez l’article « Sujet et thème d’un roman : les fondations »
Le seul impact de la longueur de votre livre sera sur le prix, car il est vrai qu’on paye généralement plus cher pour un pavé que pour une nouvelle. C’est tout.
La bonne question à se poser n’est donc pas « Quelle longueur doit faire cette scène ? » mais plutôt « Quel intérêt a cette scène ? », car si la réponse est « aucun » alors elle ne sert qu’à noircir du papier et doit donc être supprimée (ou modifiée) sans état d’âme.
Pour répondre à cette question (plus difficile qu’elle en a l’air), je vous invite à chercher le pourquoi pour toutes vos scènes (oui, toutes), et ce sur 3 niveaux différents :
« Pourquoi j’ai besoin de cette scène ? » : c’est la plus facile, car elle ne concerne que l’auteur. En quoi les événements de cette scène sont-ils importants pour faire avancer votre intrigue ?
Pourquoi est-il important que le bateau percute un iceberg ? Parce que sinon le bateau ne coule pas et qu’au lieu de « Titanic », on se retrouve avec un épisode de « La croisière s’amuse ».
« Pourquoi ce qui se passe est possible ? » : on s’intéresse à la logistique, au concret. Pourquoi le héros peut tuer le méchant avec son revolver ? Parce qu’il reste une balle dans le canon.
« Pourquoi c’est important pour mon personnage ? » : c’est la plus difficile (mais aussi la plus importante). En quoi cette scène va-t-elle impacter le conflit intérieur de mon personnage et le faire changer ?
Pourquoi Mufasa doit mourir ? Pour que Simba s’exile, rongé par la culpabilité. Pourquoi rencontre-t-il Timon et Pumba ? Pour qu’ils lui enseignent une façon de fuir cette culpabilité (Hakouna Matata). Pourquoi est-il retrouvé par Nala ? Pour le mettre face à ses responsabilités… etc.
S’il vous manque la réponse à une de ces questions, c’est que vous êtes passé à côté de quelque chose d’important.
Les clichés et fantasmes sur le métier d’écrivain ont la vie dure. Ils sont encore nombreux à penser qu’un auteur se fait livrer ses idées par une muse de chez Inspiration and Co, s’installe devant un clavier en robe de chambre avec un verre de bourbon, tape jusqu’au mot « FIN » puis envoie son manuscrit à un éditeur qui se charge de l’imprimer.
Et ben… non. Désolé 😉
À dire vrai, l’écriture en elle-même ne représente que 20 ou 30 % de la création d’un roman. Le reste, c’est moitié de préparation en amont (cf. Conseil n° 2) et moitié de réécriture en aval.
Une fois votre préparation terminée, vous allez effectivement taper votre histoire en suivant votre préparation. Vous allez procéder ainsi pour tout votre roman, du début jusqu’à la fin. Le résultat obtenu est ce qu’on appelle un premier jet.
Et je connais un secret au sujet des premiers jets.
Vous voulez le lire ?
Le voilà : les premiers jets sont TOUS mauvais.
No exception.
Votre premier jet sera lourdingue. Il comportera des répétitions à la pelle, des maladresses, des phrases trop longues, des formes passives à gogo et probablement un paquet incohérences (sauf si vous avez fait une préparation en béton armé). Quand vous le relirez, le style vous paraîtra simpliste, voire même scolaire et vous vous demanderez sans aucun doute pourquoi vous avez passé autant de temps sur cette innommable bouse.
Je vous rassure, c’est complètement normal. Ne vous affolez pas. C’est le signe que le « vrai » travail commence.
Relisez tout votre livre et corrigez, reprenez, réécrivez jusqu’à obtenir l’effet souhaité. Arrive un moment où vous ne savez plus ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Vous avez trop la tête dans le guidon. Personnellement, c’est à ce moment-là que je confie le manuscrit à une personne de confiance (mon adorable épouse) qui me fera un retour honnête et objectif sur mon travail.
Lisez l’article « 12 clés pour corriger son roman »
Combien de fois faut-il relire, corriger et réécrire son roman ? Il y a plusieurs écoles.
Certains vous diront de continuer jusqu’à ce que votre propre roman vous sorte par les trous de nez et que vous préféreriez le brûler à la gloire de Satan plutôt que de recommencer encore une fois.
D’autres vous diront qu’ils ne le font qu’une fois. Deux maximums et ils arrêtent, car la perfection est un mythe que personne n’atteint jamais.
La vérité est très certainement entre les deux. J’estime pour ma part que je dois prendre un minimum de plaisir dans mon travail d’auteur. À la seconde où il ressemblera à une corvée, j’en changerais.
« Écrivez tous les jours » est également un conseil que vous trouverez chez de nombreux blogueurs.
Je ne suis pas d’accord avec ce conseil, même s’il n’est pas totalement faux. Je pense juste qu’il manque de nuance.
D’abord, écrire doit rester un plaisir. Vous devez en avoir envie. Si cela commence à ressembler à une corvée, voire une torture, c’est que quelque chose ne va pas dans votre façon de faire. Vous devez changer quelque chose.
Ensuite, écrire tous les jours n’est pas toujours possible. Vous avez probablement une vie professionnelle à côté de votre travail d’écriture. Vous avez une famille, des amis, peut-être des contraintes financières, médicales, etc. sans oublier le besoin physiologique de vous reposer une fois de temps en temps.
Bref, il ne vous sera pas toujours possible de vous poser devant un clavier pour écrire. Vous devez l’accepter.
En revanche, il est possible (et même recommandé) de travailler sur votre livre tous les jours. Quelle différence ? Travailler n’est pas forcément écrire. Travailler sur votre livre peut vouloir dire chercher des idées, travailler un personnage, prendre des notes ou simplement réfléchir à un problème.
Lisez l’article « Comment devenir un meilleur auteur »
Un exemple : en pleine écriture de mon prochain livre, je décrivais la difficulté pour mon personnage d’atteindre un objectif malgré un manque cruel d’information. Un peu en panne d’inspiration, j’avais écrit quelque chose du genre « c’était comme vouloir atteindre une cible mouvante avec les yeux bandés ».
Une comparaison juste, mais chiante comme la pluie et déjà lue un bon milliard de fois.
Le lendemain, réunion familiale. Pas le temps d’écrire. Je coupe un oignon pour préparer le déjeuner. Mes yeux se mettent à pleurer et « BING ». Je saute sur mon ordinateur, efface le cliché et le remplace par « cela revenait à tirer sur une cible depuis un manège en marche, un oignon fraichement coupé dans les yeux. »
C’est tout ce que j’ai écrit ce jour-là, mais cela m’a suffi.
L’écriture d’un roman demande de la persévérance et un investissement personnel indéniable, mais cet investissement peut prendre de nombreuses formes.
J’espère que ces 5 conseils vous auront aidé dans votre activité d’auteur.
Si vous avez des questions ou des remarques ou si vous voulez me faire part de votre accord ou désaccord sur certains points, envoyez-les-moi par email à contact@ecrire-et-etre-lu.com ou dans les commentaires ci-dessous.