Écrire une romance, c’est se lancer un sacré défi, car il s’agit de l’un des genres les plus populaires et exigeants de la littérature de genre. Il est à la fois ultra concurrentiel car très populaire et très exigeant, parce que les lectrices de romance sont souvent des boulimiques qui connaissent les codes du genre sur le bout des doigts. En plus, il faut supporter les préjugés véhiculés par les histoires d’amour à l’eau de rose de la collection Arlequin et les éternels clichés sur les beaux mecs torse nu en couverture.
Mais ne vous y trompez pas : la romance est un genre difficile et très délicat qui marche toujours sur une corde raide tendue au-dessus d’un précipice.
D’un côté, il y a les clichés, les trames usées jusqu’à la corde et la trouille de pondre une histoire déjà écrite 1000 fois.
De l’autre, il y a les attentes des lecteurs. Des attentes inconscientes parfois, mais pourtant bien réelles. Les lecteurs de romance savent ce qu’ils veulent. Ils connaissent les éléments indispensables d’une bonne romance… et vouloir écrire une romance « originale », c’est prendre le risque de les décevoir.
Alors, comment faire ? Faut-il coller aux éternels clichés pour satisfaire les boulimiques du genre ou bien innover et risquer d’être déclassé, boudé ou ignoré par les lecteurs ?
Pour satisfaire les lecteurs exigeants avec une romance originale, il faut jouer sur les deux tableaux. Il faut comprendre et maîtriser les codes du genre à tel point que vous serez en mesure d’offrir des tropes familiers tout en les renouvelant. Vous devez comprendre la structure narrative spécifique du genre et la traduire en scènes qui tiennent le lecteur en haleine.
Dans cet article, je vous propose d’explorer les codes modernes de la romance, de décrypter les attentes du lectorat, d’analyser la structure type d’un récit amoureux, de créer des personnages attachants et de voir comment écrire une romance qui saura séduire aussi bien les amateurs aguerris que les nouveaux venus en quête de frissons amoureux.
Ces conseils sont valables pour tous les dérivés de la romance. Qu’elle soit hétérosexuelle, homosexuelle, romcom, dark, érotique ou fantasy, vous trouverez ici les codes qui les rassemblent toutes.
Mais d’abord, répondons à la première des questions :
Sommaire
La décrire comme étant une « histoire d’amour » serait beaucoup trop réducteur. Après tout, il y a une histoire d’amour dans le premier film « Terminator » sans que le film ne soit classé à la rubrique « Comédie romantique » du vidéoclub.
Pourquoi ? Tout simplement parce que l’histoire d’amour n’est pas centrale. Dans une romance, la relation amoureuse (naissante ou mourante) doit être l’intrigue principale de l’histoire. Il peut exister des intrigues secondaires pour sauver le monde de la destruction ou une société de la faillite, mais les sous-intrigues ne doivent pas pouvoir exister sans l’intrigue amoureuse. Elle est la pierre angulaire de tout le roman.
Donc, premier élément pour avoir une romance : une histoire d’amour au centre de tout (jusque-là, c’est facile à suivre).
Deuxième élément non négociable d’une romance : une fin heureuse.
Si… et ce n’est pas moi qui le dis, mais l’association des auteurs de romance américains (ou Romance Writers of America).
D’après leur définition de leur genre de prédilection, une romance doit impérativement contenir :
« Une fin émotionnellement satisfaisante et optimiste : Dans une romance, les amoureux qui prennent des risques et luttent l’un pour l’autre et pour leur relation sont récompensés par une justice émotionnelle et un amour inconditionnel. »
Et c’est logique si on prend la peine de considérer LA plus grande histoire d’amour jamais écrite de l’histoire de l’humanité : « Roméo et Juliette » d’un certain William Quelquechose (un petit jeune qui débute).
L’histoire d’amour est centrale à l’intrigue. La guerre entre Montaigu et Capulet n’est là que pour servir d’obstacle à la romance entre Juliette et son beau Roméo. Pour autant, ce chef-d’œuvre est-il considéré comme une romance ?
Non… parce que, à la fin, les amants sont raides comme des piquets.
C’est donc une tragédie.
Bien sûr, une fin « émotionnellement satisfaisante et optimiste » ne signifie pas nécessairement qu’« ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Les deux protagonistes peuvent également tirer un trait sur leur relation, réussir à tourner la page et trouver le bonheur ailleurs. Ce qui compte, c’est qu’ils soient satisfaits de leur sort.
Donc, les deux premiers prérequis pour écrire une romance :
Maintenant que nous avons les bases de ce qu’il faut, voyons ce qu’il ne faut plus, dans une romance, en 2025.
Pour structurer votre romance dans une progression logique, découvrez également notre article “Les étapes pour écrire un roman | De A à Z” qui propose un canevas narratif applicable à tous les genres.
Même si les tropes de la romance ont la vie dure et continuent de faire l’unanimité, il en est certains dont les lecteurs ne veulent plus.
Par exemple, plus d’héroïnes passives qui attendent d’être sauvées par un beau chevalier sur son cheval blanc.
Il ne veut plus non plus de héros toxiques dont la jalousie maladive ou la domination sont présentées comme des preuves d’amour. Ce type de schéma, autrefois toléré, sonne aujourd’hui faux, voire dangereux. Le consentement explicite est devenu une règle d’or (et c’est tant mieux).
En 2025, écrire une scène où un « non » se transforme magiquement en « oui » est un aller simple pour l’oubli ou un très mauvais buzz sur les réseaux sociaux. La romance moderne refuse les raccourcis douteux et exige que les personnages grandissent et s’élèvent grâce à leur relation. Un couple où l’un des protagonistes ne gagne rien à s’aimer n’a plus sa place dans une romance crédible.
La romance s’appuie sur une structure éprouvée, que l’on peut adapter à l’infini mais qui conserve toujours les mêmes grandes étapes.
Tout comme le voyage du héros ou la pyramide de Freytag, elle n’est donc pas un carcan trop serré qui étouffe la créativité ou l’originalité. Affirmer cela reviendrait à considérer que toutes les peintures du monde se ressemblent parce qu’elles utilisent les mêmes trois couleurs primaires.
Pour en savoir plus, lisez l’article « Construire un arc narratif »
Ce canevas doit plutôt être vu comme une succession d’étapes placées de façon à vous amener à bon port. Le chemin reliant chaque étape est laissé libre à l’auteur. Mais en louper une, c’est prendre le risque de se perdre.
La tension en romance vient du jeu du chat et de la souris. À chaque progrès (un sourire, un baiser), un recul s’impose (une dispute, un obstacle). Ce mouvement pendulaire entretient le suspense émotionnel. Trop de facilités, et le récit devient fade. Trop d’obstacles, et il tourne à la torture gratuite. Comme dans un thriller, l’art est de doser.
L’équilibre des deux crée la richesse du récit. Trop d’externe, et la romance ressemble à une télénovela brésilienne. Trop d’interne, et le lecteur a l’impression d’assister à une interminable séance de psy.
Chaque étape doit découler naturellement de la précédente. Le premier baiser n’arrive pas « parce que c’est la page 100 », mais parce que les personnages ont accumulé assez de tension pour que ce moment devienne inévitable. Comme dans un roman policier, où la révélation finale ne vaut que si chaque indice y a conduit, la romance ne convainc que si chaque geste est justifié.
En somme, écrire une romance qui tient en haleine, c’est manier la dramaturgie du suspense au service des sentiments. Le lecteur sait qu’il aura sa fin heureuse, mais il veut trembler, douter, espérer avant d’y arriver.
Comme pour tous les romans, quel qu’en soit le genre. L’histoire d’une romance repose avant tout sur ses personnages. Ce sont eux qui portent le récit sur leurs épaules. À ceci près que, pour la romance, l’auteur doit réussir à créer une alchimie entre eux, sans quoi son roman ressemblera à une réunion PowerPoint d’après déjeuner.
Alors quels sont les ingrédients indispensables pour réussir les personnages de sa romance ?
Chaque personnage doit avoir une faiblesse qui le rend humain. Elizabeth Bennet est trop prompte à juger, M. Darcy trop prisonnier de son orgueil. Sans ces défauts, leur histoire n’aurait pas la même saveur.
Dans Rebecca, Maxim de Winter est hanté par son passé, et c’est précisément cette faille qui nourrit la tension avec sa nouvelle épouse. Le lecteur n’aime pas les statues de marbre : il veut des êtres qui trébuchent, qui doutent, qui se trompent, et qui évoluent.
Ce sont ces failles qui vont alimenter les conflits internes de votre histoire d’amour et ce sont souvent les plus puissants et les plus difficiles à surmonter.
Un couple crédible fonctionne comme un duo d’enquêteurs. On peut opposer l’ours mal léché au rayon de soleil (grumpy/sunshine), comme dans tant de comédies romantiques où le cynique finit désarmé par la joie de vivre de son partenaire.
On peut choisir le trope enemies to lovers, où chaque échange est une joute verbale rappelant les passes d’armes d’Elizabeth et Darcy. Ou encore l’archétype des friends to lovers, où la sécurité de l’amitié devient un obstacle majeur à surmonter.
Ce qui compte, c’est que l’opposition initiale crée des étincelles, et que ces étincelles aient la force d’illuminer toute l’intrigue. L’amour n’est pas crédible quand il tombe du ciel ; il l’est quand il naît de la confrontation des différences.
Si les dialogues en romance se contentent de déclarations sucrées, le lecteur fermera le livre avant même le premier baiser. Ce qu’il attend, c’est du sous-texte, des phrases qui disent une chose mais en signifient une autre. La romance se nourrit de dialogues où l’attirance perce derrière les mots.
Par exemple, si le protagoniste déclare : « Tu peux me demander ce que tu veux et je le ferai ». La question peut se poser : croit‑il vraiment ce qu’il dit ?
En surface, la phrase semble un serment absolu. Mais le sous‑texte peut révéler un désir d’être à la hauteur ou l’envie de tester l’autre pour jauger son amour. L’auteur doit décider s’il veut que le lecteur croie en sa déclaration ou s’il sait qu’il ment pour une raison X ou Y. Il doit décider si sa déclaration comprend des limites tacites (par exemple, accepterait-il de tuer pour elle ?) ou si le personnage est complètement en roue libre.
C’est une règle importante dans l’art d’écrire un dialogue : une réplique ne doit pas dire exactement ce qu’elle a l’air de dire.
Vous voulez en savoir plus sur les dialogues ? Lisez l’article « Comment écrire des dialogues naturels : 11 principes essentiels »
Une romance digne de ce nom montre des personnages qui changent. Ils ne se contentent pas de tomber amoureux : ils deviennent meilleurs grâce à cette relation.
Dans Orgueil et Préjugés, Darcy apprend l’humilité, Elizabeth apprend à voir au-delà des apparences. Le lecteur veut sentir que l’amour n’est pas seulement une récompense, mais une transformation. C’est ce chemin, plus encore que le baiser final, qui fait battre le cœur.
En romance, les tropes sont aussi inévitables que la mort ou les impôts : on sait qu’ils arrivent, on les attend, mais on veut tout de même être surpris par leur mise en scène. Les clichés lassent, les tropes rassurent. La différence ? Le traitement.
Certains tropes sont devenus les piliers du genre :
Le lecteur veut ces tropes, mais il exige qu’on les revisite. L’auteur doit apporter une touche personnelle : un décor inattendu, un rythme différent, une voix originale. Sinon, la ficelle devient corde de pendu.
Ce qui fatigue le lecteur, ce n’est pas la présence de ces tropes, mais leur traitement paresseux.
Un « faux malentendu » résolu en deux lignes n’est pas une vraie séparation. Une déclaration enflammée sans évolution des personnages sonne creux. Pour éviter le cliché, il faut creuser le sous-texte, donner du poids aux choix, et rendre chaque scène inévitable dans le parcours des héros.
En somme, les tropes sont comme les ingrédients d’un poulet basquaise : on sait qu’il y a du poulet, des poivrons et de la tomate dans la casserole. Ce qui nous intéresse vraiment, c’est comment le cuisinier va mélanger tout cela, avec quelles épices il va en relever le goût et comment il va présenter les assiettes.
Avant de poser la première ligne, explorez “Préparer le premier jet de son roman” pour vous mettre dans les meilleures conditions pour écrire.
Non. Ou plutôt : si, mais ce n’est plus une romance au sens du genre. Un happy end (HEA) ou au moins un happy for now (HFN) fait partie du contrat de lecture. Sans cela, vous écrivez une love story ou un drame, pas une romance.
La fourchette est large : entre 55 000 et 100 000 mots selon le sous-genre. Une rom-com peut être courte et vive, une romantasy nécessitera plus d’ampleur. L’important n’est pas la longueur, mais le respect du rythme et des scènes clés.
Pas du tout. Les tropes sont des repères attendus par les lecteurs. Ce qui est ringard, c’est de les utiliser sans originalité. Un enemies to lovers peut être frais et captivant si les dialogues, le décor ou la dynamique des personnages sortent du lot.
Ne précipitez pas les choses. Construisez la tension, laissez vos personnages hésiter, puis franchir la limite au moment où c’est inévitable. Le baiser doit être la conséquence de ce qui précède, pas un ornement plaqué. Un simple effleurement de main bien préparé peut émouvoir plus qu’une description anatomique laborieuse.
Pas obligatoirement. Mais l’alternance est efficace pour renforcer l’immersion. Elle crée souvent une ironie dramatique : le lecteur sait ce que ressent chaque protagoniste et tremble de les voir ignorer l’évidence.
Non plus. Cela dépend du sous-genre et de la promesse faite au lecteur. Une romance feel-good peut rester pudique, une dark romance ou une new adult explorera davantage la sensualité. Tout est une question de cohérence.
Un conflit crédible doit découler des failles et des choix des personnages, pas d’un malentendu de deux lignes. Inspirez-vous du suspense : un bon obstacle naît d’une menace réelle, pas d’un quiproquo qui s’évapore à la première conversation.
Écrire une romance, ce n’est pas réinventer la poudre, c’est apprendre à manier les étincelles. Le lecteur sait déjà qu’il aura droit à une fin heureuse, mais il veut douter, trembler, espérer avant d’y arriver. Votre rôle n’est pas de casser les codes, mais de jouer avec. Mais pour cela, il faut les connaître au moins aussi bien que vos lecteurs.
La solution pour y arriver ? Lire de la romance. Mangez-en jusqu’à ce qu’elle ressorte par tous les pores de votre peau. C’est la méthode la plus efficace et la plus douce que je connaisse pour s’imprégner des codes d’un genre (quel qu’il soit).
Maintenant, rappelez-vous :
La romance est un genre populaire parce qu’il offre une promesse de bonheur. Tenez cette promesse, mais surprenez par le chemin. En fin de compte, ce qui restera, ce n’est pas seulement le baiser final, mais la manière dont vous aurez conduit vos lecteurs jusqu’à lui.
Et vous, qu’attendez-vous d’une romance réussie ? Partagez vos attentes et vos tropes préférés en commentaire : la discussion ne fait que commencer.
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